L’autre jour, lors de mon furtif passage en Lorraine et alors que je venais de passer ce qu’on appelle communément une journée de m.rde après 3 tentatives d’entrer en contact avec le cerveau des conseillers de ma banque (changer de banque, c’est le genre de truc qui pourrait figurer sur la liste des 12 travaux d’Hercule dans une version moderne). Avec le Mec on avait décidé de faire une balade dans les vignes pour se changer les idées, mais après même pas 10 minutes on s’engueulait déjà sur fond de tu marches trop vite-arrête un peu de râler-franchement tu me saoules des fois. Du coup, je décidai de le planter là et de couper à travers champs pour rentrer bosser- quitte à s’isoler pour bouder, autant que ça fasse avancer les affaires courantes. Je marchai d’un bon pas quand j’ai vu surgir d’un taillis à ma gauche un flanc roux, une tête effilée inquiète, humant l’air avant de s’enfuir en sautillant dans les fourrés. Un chevreuil! Ça faisait longtemps que je n’en avait pas vu d’aussi près!
Évidemment, j’étais déçue de n’avoir pas été plus à l’affut (je sais quand dans ce coin là, ce type de rencontres n’est pas rare), de n’avoir pas été plus silencieuse, de n’avoir pas eu à la main mon appareil photo… Je décidais de m’arrêter et d’attendre -le taillis n’étant pas bien étendu, en étant patiente, l’animal finirait bien par réapparaitre. Je ne sais pas combien de temps je restai là, les fesses sur les talons, à attendre. Ce pourrait être 10 minutes comme 1h, mais quand finalement je me relevai, les jambes ankylosées et le cou fourbu d’avoir été longtemps tendu à l’affut, l’herbe qui bruissait autour de moi semblait avoir pris une teinte fluo et il me semblait en entendant le bruit du vent dans les branches et le chant des oiseaux si nettement sortir d’une sorte de transe silencieuse.
Et surtout je n’étais plus en colère. Et je m’en fichais au fond que le chevreuil réapparaisse ou non. J’étais bien là, à écouter le vent et les bourdons, et j’aurais bien aimé que le Mec soit là aussi, et pas à ruminer plus loin sur le sentier. J’aurais voulu rester là des heures, et me sont revenues en tête les heures passées dehors enfant, à rêver de cabanes, d’expéditions forestières et de brochettes sous la cendre -à lire Copain des bois donc, mon inséparable compagnon d’alors qui m’a tout appris de l’art de remplir un sac à dos, de reconnaitre herbes et oiseaux, de construire tipis et igloos… Je crois l’avoir parcouru cent fois, et il n’est pas un séjour chez mes parents où je n’y mette le nez…
Si à l’époque où je l’ai lu pour la première fois j’étais trop jeune pour aller camper seule dans les bois, observer les chouettes effraie dans les granges abandonnées ou me lancer dans la confection de raquettes des neiges, je suis aujourd’hui trop citadine pour mettre ce genre de plans à exécution très souvent, mais ce livre reste la caution sauvageonne qui me relie à la terre et fait de moi en pleine nature une pas tout à fait étrangère… J’ai retrouvé ça ce jour-là, ce sentiment de repos dans le caractère inutile et essentiel qu’il y a à cueillir des brindilles et à regarder sauter les criquets.
J’ai eu plus tard d’autres volumes de la même collection comme le passionnant copain des villes, on m’a dit le plus grand bien de la version marine et, l’autre jour au jardin partagé lyonnais, alors qu’on se demandait comment faire sécher les prunes pour les préserver plus longtemps, je pensai en souriant que tout était expliqué en détail dans copain des champs… J’ai découvert depuis que ces livres étaient cultes pour beaucoup de gens, et que tous étaient déçus comme moi de ce que les nouvelles éditions aient été remaniées -un graphisme différent, d’autres personnages dessinés… Je suis heureuse malgré tout qu’ils soient encore distribués, et que d’autres enfants puissent rêver de fabriquer un baromètre ou de la vaisselle en papier, de taper sur des mottes avec de mini maillets dans l’espoir d’y trouver des coquillages fossilisés, et de mettre sur pied un mini moulin à dynamo dans le ruisseau pour alimenter leur toile de tente en électricité…
Ps: Big up à mon papa qui a gentiment pris les photos du livre que j’avais oublié! En espérant (un peu) que ça lui ait donné envie de construire une cabane en haut de son mirabellier! ^^
Je n’ai pas eu ce genre de lecture, mais Le Mec a eu le guide des Castors Junior. J’avoue avoir toujours crû que c’était une blague, mais ce livre existe bel et bien.
La Lorraine, hummm découverte en février de cette année, Pompidou en cause. Mais je ne pense pas y retourner pour un chevreuil.
Une jolie histoire ou comment retrouver sa sérénité ! On se rappelle de nos parents qui connaissait tous les noms d’oiseaux, le nom des arbres et de fleurs de champs. La ville nous a complètement déconnecté de la nature et pourtant …
Sais-tu la denrée quand est-ce que je repense avec nostalgie à se livre pour ma part ? Lorsque je lève les yeux vers le ciel la nuit venue, et que j’enrage de ne pas savoir repérer ni nommer les constellations…
Oh je l’avais aussi ! J’adorais !
@la denrée de l’espace: il faudra trouver les nouvelles versions pour les poulettes! Attends-toi dès maintenant à nettoyer des bottes crottées et à poser des pièces sur les genoux des pantalons! 😉
@Melle Blanche: c’est quoi cette histoire de Pompidou, t’es donc pas venue pour les macarons, les bergamotes et la mirabelle?!!
@matchingpoints: j’avoue être assez calée en la matière, grâce à copain des bois mais aussi à ma maman!
Moi, c’était le manuel des Castors Juniors, que j’ai transmis d’ailleurs à Sainte Chérie. J’avais la totale (même le tome sur les tours de magie et celui sur les recettes de Grand-mère Donald !). Une mine et aujourd’hui encore, il m’arrive de m’en rappeler pour ceci ou cela…
Je te lis souvent silencieusement, mais je me motive pour une fois à commenter car tu viens de faire ressurgir un très beau souvenir – moi aussi j’ai eu ce(s) livre(s) et j’ai adoré rêver à mes aventures de Robinson…
Merci pour avoir ramené ça à la vie, et pour ta jolie anecdote de chevreuil.
@xelou le loup: team #copaindesbois! 😉
Copain des bois… je l’adore.
Qu’est ce que j’ai pu le feuilleter !
Je me souviens que je l’avais reçu du copain de ma soeur pour mes 24 ans … car vu que j’étais scout, ça me servirait !
Je l’aime tellement que je le garde bien précieusement
Bises
Joelle