La première fois que j’ai rencontré Roberto Sironi, c’était lors du Salon fa’ la cosa giusta où il vendait ses tableaux… Quelques minutes plus tard, j’apprenais qu’il était avant tout musicien, chanteur à succès, mais qu’il écrivait aussi des pièces de théatre, et avait même réalisé un film présenté à Cannes il y a quelques années… Comment un tel ovni transdisciplinaire se trouvait-il sur un salon dédié à l’éthique et à la mobilité? Tout simplement parce qu’en plus de tout ça, Roberto essaie en ce moment de monter un nouveau projet: faire une tournée à vélo pour allier ses passions, offrir une nouvelle visibilité à son travail, ouvrir de nouveaux champs de promotion à la musique en Italie, et parcourir le pays pour lier émotion du parcours cyclable et finalité artistique…
Là où le projet est encore flou, c’est dans la définition de son parcours: Roberto hésite entre la France où il a vécu une dizaine d’années, qu’il sait réceptive à son talent et plus ouverte aux artistes et aux projets émergents avec de petites salles de spectacle, MJC, centres culturels et soutien des collectivités, et l’Italie qui aurait bien besoin de méthodes alternatives pour rebooster son potentiel culturel… L’occasion d’évoquer la situation culturelle à Milan, et plus généralement en Italie, et la difficulté d’y monter de nouveaux projets…
« Le problème en Italie, c’est que tout est politique. Pour pouvoir exposer ou jouer dans les locaux publics, il faut passer devant une commission municipale, et la présentation dudit projet sert alors les guerres intestines au niveau politique… Comme je chante en français et en italien, mais aussi en milanais, j’avais aussi pensé monter un projet autour du dialecte local, mais tout de suite la Lega Nord* s’y est intéressé pour instrumentaliser le projet… Je refuse que l’art soit récupéré politiquement, la politique n’est pas mon but et j’ai toujours refusé de l’y méler »
D’autres difficultés à surmonter ici, l’absence de moyens dédiés à la culture, la rareté des petites salles de concert, mais surtout la difficulté à faire admettre le mélange de disciplines que comprend le projet d’une tournée à vélo: « Les différents services se renvoient le dossier: culture, environnement, mobilité, ils ne savent comment le classer… Ma seule chance, c’est d’être à présent suffisamment reconnu pour ne plus avoir à répondre à la sempiternelle question « mais, chanteur, auteur, peintre, au juste que fais-tu? » »
Si en mai 2012 la Fondation d’Art Oxylane, la fondation lilloise de Decathlon dédiée à la promotion des liens entre l’art et le sport, s’est montrée intéressée par le projet, la suite concrète se fait encore attendre, et c’est peut-être la revue dédiée au cyclisme Cycle, qui a consacré un article à Roberto dans son n°2, qui aura la chance de l’accompagner dans ce projet, à moins que ce ne soit le réseau associatif Arci, très bien implanté sur le territoire et visiblement intéressé, qui ne lui permette un jour de pédaler sans compter…
Ce qui est sûr, c’est que l’opiniatreté de Roberto Sironi continuera de le porter, car, malgré les déconvenues et les obstacles rencontrés, cet amoureux des arts continue sa route: « J’ai appris quelque chose d’important avec la peinture: quand je peins un tableau, je ne sais pas encore si je vais le vendre, mais ce qui est sûr, c’est que, si je ne le peins pas, je ne le vendrai jamais… » Une belle leçon de ténacité!
*parti régionaliste aux valeurs plus que discutables, notamment attaché aux dialectes et symboles du nord du pays
Roberto Sironi exposera les 18 et 19 mai lors de la fete du cyclotourisme à Gropello Cairoli près de Pavie.