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L’autre jour, je suis allée à l’inauguration d’un hotel à Milan, et bien que la soirée ne soit pas follement animée, il y avait tout de même dans l’une des cours que comptait l’endroit un type qui faisait du risotto alla milanese dans une marmite géante, et ça, ça valait le détour… Y’a un truc avec les marmites géantes, j’adore l’idée de quantités dingues, de chaudron, quand il faut se hisser pour humer le fumet du plat, et puis les cuillères en bois à manche de 60cm, et puis les couvercles qu’on croirait des boucliers médiévaux…

Je pourrais vous faire un pas à pas de la recette du risotto, du comment on prépare le bouillon, comment on fait rissoler le riz rond dans le soffritto d’oignons, comment on ajoute peu à peu le liquide puis, enfin, le safran qui colorera le tout, avant de saupoudrer la préparation de fromage…

Mais je ferais bien piètre figure, comparée à ce chaudronnier écumant qui sue et souffle au dessus de ses marmites en ébullition, qui racle en hahanant pour récupérer les sucs de cuisson, qui touille et tempête en ajoutant des casseroles de bouillon brulant à la préparation, et qui exulte à la vue de tout ce jaune au fond de son chaudron…

Telle une sorcière de dessin animé, ajouter un peu de sel, une poignée de fromage en riant, s’agiter à nouveau, prenant à bras le corps sa cuillère en bois de géant pour vérifier la consistance du mélange, faisant tinter couvercles, hissant la flamme du bruleur et riant dans un nuage de buée parfumée qui le cache un instant à notre vue…

Le tout pour enfin servir, aux curieux en file indienne comme pour la communion, du bout de son imposante louche et avec force gesticulations, dans des assiettes d’un blanc de neige, une poignée de sa mixture du jour, potion magique aux vertus inconnues, philtre de satiété et comme né, non d’une recette mais d’une inspiration subite, son or jaune…