Reprenons les bonnes habitudes avec probablement la rubrique la plus ancienne du blog, celle de l’instant culturel où je rassemble mes meilleures lectures du moment. La nouveauté cette année, après l’introduction en 2015 d’une nouvelle addiction pour la BD, c’est qu’on y parlera aussi d’audio-books, variante paresseuse à laquelle je m’adonne occasionellement malgré une tenace tendance à m’endormir au son de la voix du conteur…
J’ai commencé l’année sous la couette avec une bronchite, des idées sombres et un habitué de cette chronique: Simenon! Plus particulièrement avec Le fils Cardinaud, mari quitté prêt à tout pour retrouver sa femme et reprendre sa vie toute traçée de petit notable de province respecté, puis dans Il y a encore des noisetiers avec François Perret-Latour, prospère directeur de banque installé place Vandôme, obligé de remettre en cause sa vie bien réglée après la reception d’une lettre de la première de ses trois femmes. Dans ces deux livres, une même idée, celle de l’imprévu qui surgit et oblige à revoir ses plans, celle d’un facteur qu’il n’est jamais possible de prévoir, meme par les plus fins stratèges: le facteur humain. Simenon, encore une fois, se pose en maitre en terme de finesse d’analyse, et dose les informations livrées au lecteur avec une parfaite et quasi insupportable parcomonie…
J’ai souvent dis ici mon amour pour les romans d’Alessandro Baricco, pourtant souvent taxé d’écrivains pour minettes (miaou). Novecento, Océan mer, City, Cette histoire là… autant de livres auquels je repense souvent, et qui n’ont pas encore fini leur chemin dans ma tête, même après plusieurs années. Aussi, je ne me préoccupe pas trop de n’avoir pas forcément saisi au premier abord toutes les subtilités du dernier lu Emmaus, roman d’apprentissage un peu cruel et vaguement teinté de mysticisme, où un groupe de jeunes gens en quête de pureté et de sens fini par se laisser entraîner du mauvais coté, attirés par la belle- et en apparence facile, Andrée…
J’ai eu tout d’abord un peu de mal avec l’entrée en matière d’Un parfum d’herbe coupée de Nicolas Delesalle: déçu retrospectivement par les derniers mots échangés avec son grand-père, l’auteur décide d’écrire pour sa descendance, en la personne d’Anna, une arrière petite-fille encore imaginaire, et de lui faire partager quelques moments marquants de sa vie, ses premières fois, ses premiers éblouissements. Un artifice dont le livre n’avait nul besoin pour m’emporter loin, à l’arrière d’une CTS avec le chien Raspoutine, au bord de l’étang avec les derniers mots d’un premier amour, en classe pour de poignants portraits de profs, d’inoubliables émois littéraires, sous les chênes à la quête de champignons ou, journal ouvert à la page d’un tragique accident, à l’instant des premiers renoncements… Lu d’une traite, entre improbables anecdotes, mythes personnels et souvenirs plus universels (la dizaine d’années qui me sépare de l’auteur n’y change rien, certains de ces souvenirs me semblent miens!), ce livre est l’occasion d’un joli moment, entre retour au monde perdu de l’enfance et bilan.
Les livres audio, je n’y ai souvent recours que pour mieux m’endormir, ou en cas de grosse migraine m’empéchant de lire… Mais comme tout, c’est sans doute une question d’habitude (ne pas fermer les yeux, ne pas se laisser bercer) et j’ai réussi dernièrement à écouter de bout en bout plusieurs oeuvres, dont Mad Monkton de Wilkie Collins, une épopée fantastique à l’ancienne pleine de suspens avec duel, secrets de famille et superstitions de crypte, et j’ai adoré cette façon nouvelle d’entrer dans une histoire, tenue en haleine par un rythme de lecture autre que le mien! Si Stephen King dans sa biographie se vante d’en écouter souvent au volant, j ‘ai pour ma part bien envie d’instaurer une soirée livre audio hebdomadaire, calée dans le canapé comme pour une séance de ciné! Un vaste choix est dispo en téléchargement gratuit sur litteratureaudio.com, notamment des classiques, si vous voulez vous familiariser avec la formule!
De tout temps j’ai trouvé refuge dans les livres. De déprime de rentrée en rupture amoureuse, j’écumais les rayonnages des bibliothèques et les linéaires de la fnac à la recherche de l’antidote, j’ai arrété de fumer en lisant Allen Carr, trouvé pas mal de réponses chez mes auteurs favoris, et puisé évasion et motivation littéraire face aux aléas de la vie. Les événements de ce début d’année qui m’ont laissée pantoise et déprimée ont ainsi tout naturellement guidé ma main vers un livre récemment reçu, promesse de rigolade à la sauce irrévérente, recueil des chroniques culinaires Encore des nouilles de Pierre Desproges, paru en septembre 2014. La préface lue, la première recette de pâté de sardines au pastis mise au menu, j’en entamai la lecture, quand une illu d’un trait dernièrement malheureusement trop vu attira mon attention et me força à un examen plus attentif de l’ouvrage, dont je n’avais que survolé la présentation. Cet opus comico-culinaire, rempli de pépites sur la bienséance au restau, le choix du vin, le sauçage d’assiette et le fois gras d’Ibiza, parsemé de bons mots, de trouvailles linguistiques et expressions goûtues, autoproclamait son usage de pansement moral, illustré par Chabu, Catherine, Charb, Luz, Riss, Tignous et Wolinski. Et avec ce texte en exergue: « Pourquoi? Pourquoi cette fausseté dans les rapports humains? Pourquoi le mépris? Pourquoi le dédain? Où est Dieu? Que fait la police? Quand est-ce qu’on mange? », ce n’est (presque) plus du hasard, ça frise l’épiphanie!
Ca faisait bien longtemps je crois que je n’avais pas lu un roman fantastique, bien que ce genre ait dans ma jeunesse été mon préféré… L’océan au bout du chemin de Neil Gaiman, s’il échappe aux classifications, du moins les interroge-t-il. Est-ce un roman fantastique, un conte pour enfant, le souvenir enfoui d’un rêve ou un fantôme du passé? Quand on est petit, on aime se faire peur, et certains souvenirs balayés par la rationalité adulte ne demandent qu’à resurgir, à convoquer l’enfant en nous pour y croire à nouveau, avec plus de force, plus de vérité, que le monde cartésien communément appelé réalité. Le narrateur se perd ici sur les routes de son enfance et revient sur un épisode ancien, celui d’une aventure dont la consistance lui échappe à présent. Ont-ils vraiment essayé, avec la voisine Lettie, de chasser un mauvais esprit dans la foret? S’est-il réellement battu contre des ombres dans le cercle des fées? La mare est-elle réellement un océan qui sommeille? Son père a-t-il vraiment tenté de le noyer dans la baignoire après le diner? Les révélations et les songes d’antan se mèlangent dans une temporalité décalée (la femme qui le reçoit sur les lieux est-elle Lettie, sa mère ou sa grand-mère?) et créent un univers parallèle, entre échappatoire et création de l’esprit, où se nichent à n’en pas douter les belles plumes et les enfants trop vite grandis.
Et vous, vous avez essayé les audio-livres? Si vous avez des titres ou des sites à me recommander, dites-le moi! Que lisez-vous en ce moment? Moi j’ai une pile grande comme ça de livres reçus qui m’attend, et j’ai hâte de vous parler du dernier opus de La recherche du temps perdu de Proust que je me suis finalement décidée à lire et qui, si ceux qui m’ont conseillé ont raison, devrait m’ouvrir les portes de « ceux qui en sont » et me donner l’envie de relire d’une traite toute la série!
J’ai été donneuse de voix, mais j’avoue avoir un mal fou à apprécier les livres lus.
@Heidi: en fait ça dépend beaucoup de la voix et du rythme du lecteur. J’ai laché certains titres à cause d’accents trainant dont je ne parvenais pas à faire abstraction!
J’entends beaucoup de bien du livre « Un parfum d’herbe coupée », j’ai très envie de le lire du coup 🙂
Comme Heidi, je ne suis pas fan de livres audio. Ce n’est pas tellement une histoire de voix mais plutôt de rythme. Je lis très vite donc j’ai l’habitude d’avancer vite dans les histoires:) Avec l’audio il faut prendre le temps…
@Lou: c’est vrai que j’ai tendance à trouver les lecteurs un peu molassons 😀 En fait ce qui est génant, c’est que le rythme soit le meme tout au long de l’histoire, quand on aurait tendance en tant que lecteur silencieux à accélérer lors de certains passages! (en meme temps, à mon rythme de lecture, j’aurais sans doute des problèmes pour articuler et etre bien claire!)
Bonjour !
Merci pour ton article, je découvre des livres que je ne connaissais pas.
A bientôt !
l’oeuf et moi de betty mac donald années 1947 pour se fendre la poire! et très bien écrit; thème le retour à la campagne d’un couple dont le mari veut élever des poussins! du coté de Seattle : « Bob manifestait à l’égard de mes lessives et repassages une indifférence qui me mettait hors de moi: il ne cessait de changer de linge, tant qu’il pouvait m’en soutirer du propre.A la fin j’étais devenue pareille au chien qui défend son os; je montrais les dents quant on touchait à ce que j’avais lavé et repassé……..non n’allez pas croire…non j’aurais voulu qu’il se rende compte du terrible labeur que c’était à se rompre le dos que de lui fournir à jet continu du linge de rechange; j’aurais voulu qu’il eut de temps en temps un mot aimable à ce propos.. »Seigneur lui disais-je au comble de l’éxaspération « à vous entendre on croirait qu’il n’y a que vous qui travaillez -on dirait que pour chaque oeuf vous avez du accoucher la poule au forceps…
@marie: effectivement ça m’a l’air haut en couleur, je le mets sur la liste à dénicher lors de mon prochain passage en France!
je l’avais commandé sur internet allez un petit extrait supplémentaire… »Pluie, pluie, pluie à n’en plus finir….et ainsi jusqu’au environs de novembre où je me pris à oublier qu’il pouvait y avoir une saison sans eau et à ressembler étrangement aux personnages de tous les romans où la pluie joue le rôle principal- ce genre de personnages qui rodent tels des fous furieux, se jetent la tete contre les murs, boivent le wisky dans des verres à eau et ne cessent de gémir: « cette pluie!ah cette pluie! cette bon dieu de pluie! »…Peut etre vous demandez vous pourquoi je n’empoignai pas un bon livre , ne m’installais pas à coté du poêle…c’est que je dois vous dire encore que poêle, comme nous l’appelions, n’avait aucun de ces dons de chaleur et de cordialité qui s’associe d’ordinaire à ce mot. En premier lieu il était trop vieux et, tel ces vieillards que vous connaissez bien, il était bati comme un turc, doté d’un appétit féroce et dénué de tout sens de l’entraide. Vouloir qu’il crépite ou rugisse était une entreprise aussi vaine que d’espérer arracher un gloussement ou une grimace au rocher de gibralatr..j’avais beau fendre le bois de sapin le plus sec, le couper fin comme du crin et en bourrer l’énorme bedaine noire-je n’en tirais pas un son, pas une étincelle de chaleur. POurtant quand je soulevais le couvercle, tout mon bois sec avait brulé: ne restait plus qu’un peu de cendres chaudes. C’était un mystère…mais le comble, c’était qu’on arrivait à faire bouillir des choses, je dis bien bouillir-sur Poêle. Cela vous causait toujours une délicieuse surprise; que dis-je un véritable choc. N’empêche qu’à la fin je ne me précipitais meme plus comme une folle sur la porte de derrière en hurlant à bob, bob le paisible, le compétent-plongé dans son travail: « l’eau BOUT!comme je le fis les 100 premières fois où se manifesta le miracle…Poêle choisissait les matins les plus froids et les plus déprimants pour bouder dans coin de la cuisine. Il fumait, s’étouffait, s’étranglait à plaisir. Il engloutissait charge après charge de ma précieuse provision d’écorce vive. Et il était midi que j’aurais pu m’accroupir en tailleur sur son couvercle et lire douilletement la bible de bout en bout sans crainte de me bruler…
Je reviens après une longue absence (du boulot, un changement d’ordinateur, et une maladie) j’adore cette rubrique.
Tu me donnes vraiment envie de relire des Simenon, j’en ai vu l’autre jour en boutique et je n’ai pas craqué…
Comme toi j’ai lu bcp de SF ado puis j’ai arrêté.. Je me tâte toujours pour en relire.
Mais ma PàL est énorme 😉
Pour les livres audio – j’ai fait un test de lecture et sur les 24 personnes, j’étais la plus rapide donc j’aurais peur de m’ennuyer.. mais par contre, j’écoute des podcast (émission de radio sur la littérature) l’été quand je promène mon chien (ça dure environ 40′) et j’aime ça – mais le présentateur a un invité et donc il présente des extraits mais avec plusieurs voix.