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Un livre dont on ignore l’auteur, c’est sûr, de prime abord, ça intrigue… Et là semble même résider tout le sel du roman, si l’on se fie à la 4e de couverture… et pourtant! L’histoire est tellement prenante, l’écriture si limpide, les descriptions si fines, que le tout se serait volontiers passé de ce mystère supplémentaire*… Le roman commence à la Proust, dans une compagnie d’oisifs en villégiature près du le lac de Côme début 1900, où l’on s’observe et analyse les toilettes des unes et le défi dans le regard des autres, où les convenances règnent sans empêcher intrigues et amours éperdus, et où des activités anodines, telle une balade en canot ou le port d’une fleur à la ceinture, peuvent déclencher des drames ou sceller des destins…

Mais tout basculera avec l’arrivée d’un nouveau personnage, Harden, le frère de la fameuse Madame Solario, objet de tous les regards, un intrigant qui n’aura de cesse de réveiller les jalousies et d’user de son charme, à grand renfort d’oeillades et de provocations, tout en tenant sa soeur sous la menace de la révélation d’un odieux secret de famille…

Le roman bascule alors dans un drame de type liaisons dangereuses, où le frère et la soeur -contrainte de collaborer- mettent en place stratégies et intrigues gigognes pour s’attirer les faveurs des uns et éloigner les autres, afin de s’assurer un avenir florissant, tandis que leurs propres rapports basculent dans une intimité contrainte qui n’est pas sans réveiller le fantôme de l’inceste…

Un récit en apparence calme et contemplatif mais qui, dans ses tensions intestines, recèle des trésors de suspens, de tension contenue et de violentes émotions pas toujours maîtrisées, un petit bijou d’écriture dans un écrin de choix, l’ombre des collines du lac de Come en été…

*Après bien des controverses et supputations, on sait depuis quelques années à qui attribuer le roman, à la talentueuse bien que discrète écrivain anglaise Gladys Huntington.