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Souvent, je râle devant des projets ponctuels, des idées-gadgets ou du design rigolo… N’y voyez aucun snobisme de ma part (enfin pas trop, j’essaye de me décontaminer de l’air dédaigneux général adopté pendant le salon devant toute manifestation de design jugé trop peu audacieuse). En fait, j’ai dans l’idée que certains projets, s’ils présentent un intérêt conceptuel, n’en ont aucun d’un point de vue d’une production industrielle. Ils sont anecdotiques, sont des clins d’oeil, exploitent des décalages dans l’utilisation des matériaux ou des éléments, mais ne correspondent ni à une recherche orientée, ni à des besoins en termes fonctionnels… En réalité, souvent, ce sont de bonnes idées qui gagneraient à etre recoltées en livres plus qu’à être éditées et produites…

Certains l’ont bien compris: le collectif Droog à ses débuts, avant qu’il ne cède lui-aussi aux sirènes de la boutique-souvenir, le collectif Recession Design qui expose depuis 2009 une série de meubles réalisés à partir de matériaux de base de magasins de bricolage, ou encore Enzo Mari dans les années 70 avec son livre Autoprogettazione sur le même principe…

Ces ouvrages ont un sens parce qu’ils deviennent inspiration collective, et sont souvent liés à des expositions dans des galeries et musées, des workshops et communautés d’idées via web, qui permettent, outre de diffuser le projet, de l’ajourner et de le faire évoluer dans le temps.

Un bon exemple, c’est le projet Low Cost Design de Daniele Pario Perra, cette année exposé à la Fabbrica del Vapore à Milan. Un projet d’inspiration spontané né d’observations dans le monde entier, une récolte d’images d’objets, systèmes, détournements et inventions destinés à remplir une fonction bien particulière, et réalisés à partir d’objets et structures préexistants. Des systèmes qui tiennent tout autant de l’instinct primitif enfantin que des réflexion les plus poussées sur la fonction des objets…

Des portes-serviette nés de ventouses, des réchauds sortis tout droit de l’imagination de la lingère, des haltères devenues contrepoids et des objets de tous les jours, trombones, pinces à linge, chaise de jardin, elastiques ou couverts, qui trouvent une nouvelle utilité dans des combinations à la McGyver…

Des objets qu’il serait absurde d’éditer, mais qui peuvent donner naissance à une nouvelle famille d’objets, hybrides nés de l’intuition et du besoin, de l’utilisation de ressources hyperlocales et du refus de cloisonner les genres et les disciplines…

Un projet à la fois poétique et superpratique auquel tout un chacun peut contribuer au travers du site www.lowcostdesign.org, et dont tous peuvent s’inspirer grâce aux deux ouvrages Low Cost Design I e II, édités en italien et en anglais…