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Malgré le peu de temps consacré à la lecture derniérement, je parviens tout de même à vous caser un instant culturel! Vous ne direz pas que je néglige votre culture hein! Avec cette fois-ci trois auteurs italiens, et un français seulement, un match perdu d’avance soit, quoique…

On commence avec Un été à la mer, de Giuseppe Culicchia, auquel je décerne un magistral bof! C’est l’histoire d’un mec à la mer en voyage de noces, un mec qui s’ennuie déjà de sa femme toute neuve, mais surtout de lui-même, de ses cheveux qui tombent, des nouvelles du jour qui l’angoissent et de ressasser une jeunesse pas commode… Un récit qui se voudrait édifiant, à portée large, englobant avec son personnage toute une Italie en perte de repères, politiques, familiaux et sexuels dans une dépression chronique, mais qui ne réussit qu’à ennuyer vaguement… Si l’idée était de toucher du doigt l’immobilisme italien (et accessoirement, une nana de 17 ans au passage), le tout est effectivement plutôt réussi, on s’ennuie ferme sans sourire, mais pas non plus suffisamment pour clore le livre avec colère… C’est bien dommage d’ailleurs, la couverture de mon édition de poche étant d’une époustouflante beauté!

On passe à Quand le requin dort, de Milena Agus, qui gravite étrangement autour des mêmes thèmes… Nan mais qu’est ce que c’est que cette génération d’auteurs désabusés, aux personnages bancals et farcis de névroses? Le mal du siècle? La seule chose dont on parle sans complexe, c’est de sexe, mais pour le reste, on tourne en rond entre ébauches de psychanalyse et une temporalité floue qui noie les émotions liées aux événements… Au final, ni conclusions ni perspectives, les personnages restent enfermés dans des mécanismes de dépendance réciproque et on ne sort jamais de la logique du cercle familial, qui vu de l’extérieur aurait tout simplement l’air d’un ramassis de cinglés…

Mais qui vois-je arriver pour relever le niveau de l’instant culturel? Dino Buzzati bien-sûr! Pas plus optimiste, pas plus joyeux (je dirais même moins), mais qui a le mérite de dépeindre les choses et les gens par le biais de paraboles et contes fantaisistes… Bestiaire magique est un recueil de textes et articles, pour la plupart écrits pour le Corriere della sera milanais), qui ont pour personnages, voire pour héros, des fourmis en fuite, des souris qui déménagent, un veau qui parle allemand, un chien communiste, un singe dans l’espace et même un tyrannosaure… Il y dépeind une humanité tour à tour attendrie et cruelle, une existence à la fois insignifiante et primordiale, vaine mais non dénuée d’espoir…

Et enfin, enfin, on va rire un peu, grâce à un auteur français qui ne m’a pourtant pas habitué à la légéreté (c’est peu de le dire)… Philippe Claudel, auteur des mélancoliques et embrumés Meuse l’oubli, Le café de l’Excelsior et Les âmes grises, nous livre avec Parle-moi d’amour une pièce de théatre désopilante et grinçante sur le couple, dans une dispute au retour d’une soirée comme tous les couples en connaissent, à ceci près qu’ici tous les coups bas sont permis… J’ai aimé voir cet homme, à la fois symbole de réussite et un peu loser, devenir furibard, cette femme revancharde et trahie se faire mesquine à souhait, mais surtout j’ai aimé la parole libérée, cette engueulade sans retenue dans les règles de l’art où tout y passe, famille, idéaux, défauts et faiblesses, cette capacité à dire les rancunes, à balancer des insultes, des vases et des ficus sans broncher… Quand on sait que les couples qui se disputent régulièrement sont les plus durables, on aurait tort de s’en priver, même par procuration!

Et vous, que lisez-vous?

Ps: En une de cet article, je n’ai pas résisté à l’envie de publier la photo d’une oeuvre du designer Julien Carretero, exposée à Lambrate durant la Design Week, qui a relié en un seul volume la recherche du temps perdu de Proust… C’est monumental, beau et imprimé serré, intransportable, pesant et vaguement dérisoire, c’est l’humanité, l’amuuur et le désespoir dans quelques kilos de papier, évidemment j’aime!