Revoilà l’instant culturel de l’imposteur en BD! Je joue le jeu et pour pouvoir tester plein de trucs sans faire des erreurs de novices, j’ai pris un abonnement à la bibliothèque ! J’y croise des ovnis au scenario décousu, des pépites aux partis pris étranges, je mélange le rayon jeunesse et la section graphique… Je commence à comprendre ce que j’aime (les planches monochromes, les histoires sans fin et les personnages tracés un peu grossièrement). Je me plante des fois et je n’y comprends rien, je me plains quand un très bon dessin est desservi par un synopsis bancal ou qu’au contraire une super histoire n’est portée que par de grossiers aplats… J’avance, j’apprends, j’ai l’impression d’avoir 10 ans et d’entrer dans un musée pour la première fois. Quand on n’a pas la culture pour guider ses impressions, c’est un peu intimidant !
Et c’est comme ça que j’ai lu Les garde-fous de Bézian, esthétique et magnétique. Avec une maison aux lignes de fuite infinies isolée sur un lac privé, un tunnel pour seul accès et un serial killer qui rode… C’est bourré de planches quasi monochromes, de vues architecturales et de personnages à contre-jour, de violence contenue dans quelques gestes et peu de mots, de dialogues tendus et de vols d’oiseaux… En somme c’est intrigant et beau, et quand tout est résolu on n’est pas sûrs que ce soit ce qu’on avait voulu. Les garde-fous – Bézian
Dans un tout autre genre j’ai beaucoup aimé Insomnie d’Adrian Tomine. Un format réduit, des pages en noir et blanc et une succession de récits façon nouvelle sur (comme l’a dit très justement Les Inrockuptibles, et je n’ai pas de meilleurs mots) l’inconfort des relations sociales. Car c’est tout à fait ça : ce type qui rate son avion de bon matin et passe la journée à errer et une nuit à l’hôtel pour partir le lendemain sans avoir à s’expliquer, cet autre qui trouve des photos érotiques dans la chambre de son grand-père, cette vieille dame qui mange son déjeuner dans sa voiture en souvenir du passé, cette fille persécutée par petites annonces interposées… Autant de losers attachants, de petits drames quotidiens, de non-dits sur la famille, les relations amoureuses et la fatale solitude de tout un chacun. Insomnie- Adrian Tomine
Et puis il y a eu cette jolie surprise, cet album de Loïc Godart choisi pour ses dessins teintés d’ocre et son incroyable pigeon qui fait ROU en 4e de couverture. Une histoire crue et cruelle qui se déroule à Lyon (c’te hasard insensé !), dans le quartier de la Guillottière rebaptisé Guillotine (à deux pas de chez moi !), ses trams, ses personnages, cette impression de s’évader quand on va sur la presqu’ile, qu’on « monte à Fourvière » pour voir d’en haut la ville… Y’a même mon jardin partagé dedans, les boutiques de téléphones, le Lavomatic et les cafés balayés par cet ocre comme un uniforme ni gris ni vernis et les pigeons partout, témoins gloussant insensibles et omniprésents. (C’est là qu’on arrive aux limites du concept du prêt de bibliothèque, j’ai pas envie de le rendre ! Vous faites comment dans ces cas-là ? Vous l’achetez, vous prétendez l’avoir perdu au poney ?) Loïc Godart- L’oiseau chante comme le lui permet son bec
C’est tout pour cette fois! En vrai il y en a eu d’autres, mais comme je n’ai pas forcément aimé je préfère ne pas en parler! Dites-moi plutôt si vous avez des conseils et des titres à me recommander! Ou si vous connaissez de bonnes boutiques de BD à Lyon où je pourrai aller rôder…