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Wow! J’affronte ce satané syndrome de l’imposteur (ça s’applique à pas mal de domaines chez moi, mais je me soigne ça va) et j’instaure une nouvelle rubrique dédiée à la bande dessinée… Pas facile de me sentir légitime quand on sait que mes connaissances en la matière se limitaient il n’y a pas si longtemps à Boule et Bill et Enki Bilal. On va dire que je vais affronter la chose en dilettante et avec enthousiasme, que ceux qui sont plus calés que moi vont faire preuve d’indulgence quand je dévide des poncifs ou que je débarque avec un auteur que tout le monde connait depuis 10.000 ans et que je découvre à peine, et je promets pour ma part de m’appliquer et de progresser vite!

BD alberto madrigal

On commence avec Un lavoro vero d’Alberto Madrigal: C’est l’histoire d’un mec (j’adore commencer mes chroniques comme ça, c’est signe de grande vivacité intellectuelle), un espagnol à Berlin qui veut faire de la BD et qui, sur le chemin de la vie pavé de projets foireux et de nécessités alimentaires, finit par mettre de côté sa passion et devient graphiste dans une grosse boîte de geeks. Jusqu’au jour où une petite phrase (évidemment, venant d’une jolie fille) le décide à tout quitter, justement pour raconter ça: les petits hasards de la vie, les rencontres qui vous construisent et l’importance de suivre ses rêves, même contre toute logique apparente, même si on est le seul à y croire. Evidemment, c’est l’histoire d’Alberto lui-même qui, après bien des hésitations, a finalement trouvé son « vrai travail »(=le titre de la BD), celui qui le rend heureux, et a dégotté avec ce livre un éditeur en Italie (pour une fois que les italiens sont pionniers, je dis hourra!). Jetez un coup d’oeil à son blog en attendant de voir cette BD traduite en français!

BD gemma bovery posy simmonds

Certains d’entre vous ont peut-être vu le film Gemma Bovery, moi non (autre grand domaine d’inculture, le cinéma!) (je me soigne mais comme je commence par le début, j’en suis encore au cinéma muet!). Mais j’ai lu la BD dont le film a été tiré (ou est-ce plutôt un roman graphique? j’entends déjà les puristes grincer des dents): Gemma Bovery de Posy Simmonds et je dois dire que, si le dessin en soi assez conventionnel ne m’a pas particulièrement séduite, j’ai beaucoup aimé l’histoire. Car plus qu’une bande dessinée, c’est un roman illustré, et il y a beaucoup à lire, beaucoup à lire entre les lignes aussi, dans cette histoire en apparence facile. Celle d’un boulanger normand qui, faciné par sa voisine anglaise dont le nom lui rappelle celui de son héroine préférée, va lui façonner le même destin d’amoureuse tragique. Si on s’imagine longtemps qu’ils aient pu entretenir une lisaison, on comprendra vite que ses fantasmes seuls entretiennent l’illusion du réel, et que la réalité n’a pas besoin de modèle pour être parfois bien cruelle…

BD riad sattouf charlie hebdo

En ce moment, tout le monde parle de Riad Sattouf! Si le premier tome de sa BD L’Arabe du futur a reçu le Fauve d’or du meilleur album cette année à Angoulême, vous pensez bien que je ne l’ai pas encore lue! Elle est pourtant dans ma bibliothèque depuis un moment, mais j’ai préféré aborder l’auteur par son coté obscur, Pascal Brutal, avant d’opter pour le format des chroniques en 8 cases publiées dans Charlie Hebdo depuis 2004 et réunies sous le titre La vie secrète des jeunes. Si j’aime à la folie son sens de l’observation, son souçi du détail et cette habitude qu’il a probablement prise avec le temps d’invoquer les scènes incongrues, j’avoue que la lecture à dose massive de ces compte-rendus d’observation populaire a de quoi vous glacer le sang. Toute cette bêtise, cette violence, cette jeunesse à la dérive, la rue si dure, la masse vulgaire des visages et des comportements obscènes… On rit certes, mais on rit jaune, on espère qu’il grossit le trait, qu’il caricature les faits… Si Sattouf insiste souvent sur la véracité des scènes rapportées, je serais pour ma part ravie que la plupart d’entre elles ne soient pas si vraies…

BD Naples bastien vives alfred

Et enfin, mon préféré: Tranches napolitaines (titre génial dont le jeu de mot s’est perdu à la traduction italienne: Napoli, sguardi d’autore), un ouvrage collectif qui réunit plusieurs dessinateurs que j’aime beaucoup: Bastien Vivès, Anne Simon, Alfred et Mathieu Sapin (je vous ferais remarquer au passage que sur les quatre, il y en a deux dont on a déjà parlé sur ce blog, comme quoi on ne part pas de zéro tout de même), invités par le festival Napoli COMICON à séjourner à Naples pour en faire le cadre, ou le sujet, de nouvelles histoires. Un défi dont les auteurs se sont tous tirés avec brio, en évitant les clichés tout en incluant à leur récit la couleur locale qui fait le sel de l’Italie, en gardant chacun leur identité, qui en s’inspirant des mythes et légendes du cru, qui en un ample ballet muet, qui au travers de personnages et récits plus construits… Avec toujours un grand respect pour la ville et ceux qui vivent là, et quelques hommages à la gastronomie locale disséminés ça et là… (Cerise sur le gâteau, en annexe du livre, les croquis préparatoires executés sur place qui sont de petits bijoux d’observation!)

Déjà fini? En fait, ça n’a pas été si difficile que ça… Il faut croire que c’est la chance du débutant, tout ça… Je compte sur vous pour me conseiller d’autres titres, me donner des listes de classiques, d’incontournables, en somme pour m’aider à constituer une base nécessaire à l’élaboration d’une édifice d’érudisme vignettique (hein?) Bon week-end tout le monde!

D’autres BD déjà chroniquées: Vincent de Barbara Stok, Come prima d’Alfred, Polina de Bastien Vivès , Breakfast after noon d’Andi Watson, Pascal Brutal de Riad Sattouf, la tectonique des plaques de Margaux Motin, Cinq mille kilomètres par seconde de Manuele Fior, Le Nao de Brown de Glyn Dillon, Le gout du chlore de Bastien Vivès, New-York et moi de Soledad Bravi, Sumo de Thien Pham, The New Yorker l’humour des chats, La petite peste philosophique de Vanna Vinci, Confessions d’une glitter addict de Diglee