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Ça fait tellement longtemps que je veux vous parler de certains livres que je redoute d’avoir perdu déjà les impressions premières de leur lecture… Comme à chaque fois je me promets d’être plus assidue, de détailler au fur et à mesure les livres lus, mais le temps me rattrape et je finis avec un instant culturel long comme ça, qui mélange contes de Noël et littérature de voyage, BD humoristiques et romans de plage. Je ne vais pas vous promettre à nouveau d’être brève (peine perdue) ni à l’avenir d’être plus régulière. Laissons cela aux naïfs et continuons plutôt cette fuite en avant au gout de lapin blanc qui semble malgré tout tenir la distance (ça doit bien faire 10 ans que je blogue, ce fameux lapin se teinte peu à peu de rose et n’est constamment à la bourre que parce qu’il passe le plus clair de son temps à jouer du tambour)*

bd marion montaigne

Dans la combi de Thomas Pesquet – Marion Montaigne : Cette BD a été offerte au Mec à Noël, et rien qu’à le voir se bidonner pendant la lecture j’avais hâte que ce soit mon tour. J’ai beau ne pas habiter dans une grotte, je n’avais pas du tout suivi les aventures de l’astronaute français dans l’espace en 2017, et je n’ai su à quoi il ressemblait vraiment qu’une fois la BD refermée (ok, je dois vivre un peu dans une grotte). C’est peu dire que cette BD m’a passionnée : le parcours de Thomas Pesquet y est retracé, de son enfance à son retour de la station spatiale européenne, avec un humour capable de faire passer avec facilité tous les détails techniques, toutes les complexités diplomatiques et même les interminables années d’attente et d’entraînement avant que l’astronaute ne fasse finalement partie d’une mission. On suit tout cela sous l’angle rieur de l’auteur, on se rit des craintes existentielles et des contrôles médicaux avec la même facilité qu’on apprend à déchiffrer les R inversés, et on déjoue la gravité des enjeux avec un humour pipi-caca bien balancé. Au final, quand j’ai voulu en savoir plus sur Pesquet, je l’ai trouvé vachement moins rigolo qu’en BD … c’est terrible, ne laissez jamais Marion Montaigne vous approcher!

luca di fulvio

Le gang des rêves – Luca Di Fulvio : Celui-ci m’a été offert pour mon anniversaire, et a priori il avait tout pour me plaire. Un gros livre qui commence en Italie, s’étire sur des années autour de nombreux personnages foisonnants, s’attarde sur le langage de la rue, le slang des voyous new-yorkais et des immigrés et s’achève sur la beauté qu’il y a à raconter des histoires et à parler vrai… Et pourtant, au delà des séduisants thèmes abordés, je n’ai pas été happée par les personnages, trop stéréotypés à mon goût, ni par les situations trop souvent parachutées. Je garde néanmoins une certaine tendresse pour Cetta, la mère du héros qui est selon moi la seule a avoir un peu d’épaisseur. La fin du livre en particulier m’a déçue, entre cache-cache amoureux à la vraisemblance douteuse et disparition téléphonée du « méchant » de l’histoire: pour nous avoir exhorté à le détester avec force détails sordides pendant 900 pages, l’auteur lui devait bien mieux que ce tour de passe-passe hasardeux! Je suis toujours déconfite quand je n’accroche pas à un livre qui a séduit beaucoup de monde, j’ai l’impression d’être passée à coté d’un truc, et ici cette histoire est passée loin, très loin de moi…

roman policier stephen king

Carnets noirs – Stephen King : Il y a peu, je lisais Mr Mercedes, un livre de Stephen King d’un genre un peu particulier puisqu’il s’agit d’un roman policier. Si j’avais trouvé le développement de l’enquête un peu longuet, j’avais adoré les personnages. Bancals, venimeux, désaxés pour la plupart, mais criants de vérité. Du flic à la retraite qui déprime devant sa télé à la bourgeoise qui croit entendre des voix, du dangereux vendeur de glace à l’enquêteur sympa mais bourré de préjugés, personne n’y était lisse ni épargné. Je me réjouissais donc de la lecture du deuxième tome, de retrouver le personnage de Bill Hodges, et surtout de savoir enfin si Brady, le taré du tome 1 qui semble avoir fini en légume trop cuit, pouvait reprendre ses esprits! Et c’est là qu’on reconnait le talent de l’auteur. Au lieu de nous donner ces réponses, il nous entraîne dans une nouvelle histoire. Celle d’un écrivain assassiné à qui on a dérobé argent et manuscrits, celle d’un criminel incarcéré avant d’avoir pu les récupérer et celle d’un jeune garçon, des années plus tard, mettant la main sur un magot dont il ignore la dangerosité. De-ci, de là, on entrevoit le personnage de Brady, on perçoit au loin son éclat vénéneux, mais il nous faudra attendre le tome 3 pour en savoir plus… (Inutile de vous préciser qu’il est déjà sur ma liste?)

film équipe volley senior

Les Optimistes de Gunhild Westhagen Magnor : Là on ne parle pas d’un livre, mais d’un film (je sais, c’est incroyable, j’ai vu un film) (moi-même j’en reviens pas). Mais pas n’importe quel film, un documentaire norvégien sur une équipe de volley-ball senior (partez pas!). La jaquette (je suis née en 1912) annonçait un feel-good movie et ça m’a fait rire (vous n’auriez pas plutôt un film de l’angoisse?), comme si en français on n’avait pas assez de mots pour décrire un film qui met de bonne humeur, qui requinque, qui donne le sourire… un film optimiste quoi! Dans ce documentaire bien-nommé, on suit donc une bande de mamies sportives. Elles ont entre 66 et 98 ans et s’apprêtent à affronter une équipe masculine suédoise du même âge. Croyez-le ou non, c’est infiniment tendre sans être ni moqueur ni voyeur, et ces dames ont un humour et un gout des couleurs à faire pâlir mes potes trentenaires. Elles font des gâteaux et se baladent en trottinettes des neiges, se racontent des blagues dans le bus et tricotent des cocardes aux couleurs de l’équipe avec un naturel épatant. Le film a été primé un peu partout (sauf en France où on préfère les films de l’angoisse sans doute) et c’est bien normal. Car on sort vite des clichés attendus avec ces portraits délicats, et si l’on rit sans se moquer, on admire aussi sans tomber dans la sensiblerie. A voir absolument!

woolf une chambre à soi

Un lieu à soi – Virginia Woolf : Pour l’avoir longtemps cherché, j’ai été étonnée de retrouver ce célèbre livre féministe sous un titre différent de celui sous-lequel on me l’avait présenté pendant mes études de lettres (une chambre à soi). D’où l’excellente idée de commencer le livre par la préface de la traductrice Marie Darrieussecq: « Ce n’est pas une bedroom, mais une room of one’s own. », « L’intention était [t-elle] misogyne, consciemment ou pas : où travaille une femme sinon en chambre? Que pourrait-elle faire d’un bureau? Un boudoir, à la rigueur, dans les classes privilégiées?« . Invitée en 1928 à l’occasion d’une conférence sur le féminisme à l’université de Cambridge à prononcer un discours sur le thème « Les femmes et le roman », Virginia Woolf, intellectuelle féministe et écrivain, s’interroge sur l’angle à choisir pour explorer ce vaste sujet et fait de sa conférence une réflexion sur la condition de la femme qui écrit. Tout en insistant sur la nécessité d’un certain confort matériel (de l’argent et un lieu à soi), elle parcourt les ouvrages des pionnières et s’interroge sur les génies ignorés qui ont sans aucun doute traversé les siècles, faute d’indépendance spirituelle et économique. Si le ton ironique assumé laisse entrevoir l’audace qu’il fallait dans les années 20 pour insuffler de telles idées dans la tête de jeunes étudiantes, et si certains points restent a posteriori encore bien mesurés, la conclusion de Virginia Woolf est sans équivoque: « Je vous ai dis […] que Shakespeare avait eu une sœur. […] Elle est morte jeune – hélas, elle n’a jamais écrit un mot. [Mais] elle vit en vous et moi, et en beaucoup d’autres femmes qui ne sont pas ici ce soir car elles font la vaisselle et mettent les enfants au lit. […] Si nous possédons cinq cents livres de rente et un lieu à nous, si nous avons l’habitude de la liberté et le courage d’écrire exactement ce que nous pensons, […] alors l’occasion viendra et la poétesse morte qui était la sœur de Shakespeare revêtira ce corps si souvent tombé. […] je maintiens qu’elle viendra si nous travaillons pour elle, et que ce travail, même dans la pauvreté et l’obscurité, vaut la peine ». 

j'adore la mode mais c'est tout ce que je déteste

J’adore la mode mais c’est tout ce que je déteste – Loïc Prigent : Ceux qui me suivent sur Twitter savent que j’y partage essentiellement des tweets de Loic Prigent, petites phrases assassines « frivoles et féroces » entendues dans le milieu la mode. Forcément, quand son livre est sorti, il m’a fait de l’œil, mais je me disais que je préférais lire ces pépites à l’improviste et par petites doses, plutôt que rassemblées d’un seul tenant. Dans le doute, j’ai fini par l’emprunter à la bibliothèque, et depuis chaque jour je picore dedans et je ris… C’est comme écouter les gens parler dans les transports, mais en plus grandiloquent, plus fantasque, plus ambitieux dans la démesure, l’éclat ou la perfidie… ça n’a pas de prix! Extraits choisis: « J’en peux plus des assistants débraillés. Quand je débutais je venais au bureau en Mugler. Avec le trou de l’antivol, mais en Mugler« , « Elle va en robe du soir à la boulangerie. Enfin, elle ne va pas à la boulangerie mais tu vois ce que je veux dire« , « Café ou champagne? – Les deux« . <3

les cahiers d'esther 10 ans

Les cahiers d’Esther. Histoire de mes 10 ans – Riad Sattouf : Avec les amis qui m’ont offert cette BD, on parle souvent de l’enfance. Entre un pote qui dit avoir toujours été adulte (à 12 ans j’écoutais du jazz (sic)), moi qui ai zéro référence cinémato-cartoonesque (je rappelle que j’ai découvert Bambi à 22 ans et qu’avant j’étais plutôt un copain des bois) et une copine qui travaille pour l’édition jeunesse, ça donne des discussions décousues et des perceptions totalement différentes de ce qu’est et ressent un enfant. D’où l’intérêt décuplé de cet album qui suit une fillette de 10 ans dans son quotidien, entre rêves d’Iphone et de cheveux blonds, idéalisation du père, de Beyoncé et de tout ce qui porte une doudoune et une coupe de footballeur. Vu comme ça, ça a l’air complètement barré (et en fait, ça l’est vraiment), mais c’est aussi passionnant. De se souvenir de choses qui visiblement n’ont pas changé (la cruauté des enfants, les grands engouements qui durent 3 secondes et demi, les mêmes jeux inlassablement répétés), d’en découvrir de nouvelles (les fringues et la souplesse de mon temps, on s’en foutait!), d’observer l’impact des médias sur la vie des petits, les concepts mal interprétés et ces mots mystérieux qu’on répète sans bien les mesurer: Youporn, Charlie Hebdo, les pédés… C’est comme observer des insectes à la loupe que de voir ces petites bêtes curieuses (et comme perpétuellement saoules) que sont les enfants s’agiter et se livrer. Extrait choisi: « -C’est trop chelou qu’Enzo y connaisse les noms des oiseaux toussa, tu trouves pas? Ça fait mec qu’a pas de vie en fait… -Ouais c’est clair <3« 

Voilà voilà, c’est la fin de cet instant culturel bien décousu, même si en vrai je voulais aussi vous parler d’un livre de développement personnel qui a alimenté nombre de réflexions dernièrement (mais il y aurait trop à dire**, je vous ferai un article tout exprès)(si), et aussi d’un roman italien sur les méduses et les extraterrestres (mais il me reste quelques pages à lire, je peux pas chroniqué avant d’avoir terminé!!!) J’ai encore une pile de trucs à lire haute comme ça sur la cheminée, mais au cas où, donnez-moi d’autres idées, que lisez-vous?

*Pour ceux à qui la référence échappe, l’explication est là!

**Ça parle du notre rapport à l’argent, vaste sujet s’il en est, et je n’ai pas finit d’épuiser les réflexions de mes potes à ce sujet 😉